Dans l’article précédent, je vous présentais quatre principes qui caractérisent les forêts naturelles. Puis je vous proposais une combinaison de six plantes pour commencer à expérimenter avec le concept de forêt comestible, à toute petite échelle, sur votre balcon.
Dans cet article, on enfile ses gants et on passe à l’action !
Où trouver ces plantes ? Quand les planter ? Comment en prendre soin ? Et comment les multiplier pour les offrir autour de nous ?
Dans cette série d’articles, mon objectif est de vous inviter à oser expérimenter par vous-même. Je rentre dans les détails, je propose des directions claires, mais ensuite, c’est à vous d’ajuster, d’essayer ! Car chaque balcon, chaque microclimat, chaque jardinier, chaque jardinière, sont uniques, alors chaque mini-forêt est différente.
N’hésitez pas à regarder le replay du LIVE Youtube du 16 mars 2023 à 21h, heure de Paris, où Lénaïc nous a donné d’autres infos et a répondu aux questions de la communauté Vibre-Magazine !
Bonne lecture…
Où trouver les plantes ?
Si vous êtes une jardinière ou un jardinier en herbe, le plus simple est d’acheter des plants déjà en pot plutôt que des graines à faire germer soi-même. D’innombrables petits défis se présentent sur la route des jardiniers débutants, et je pense qu’il est plus efficace d’aller droit au but au début.
L’idéal serait de récupérer des plants chez un voisin ou une amie, qui sauront même vous expliquer précisément comment s’y prendre avec leurs plants.
Si vous n’avez pas cette option, on peut facilement trouver des plants dans les magasins de jardinerie (ex. tomate cerise, basilic, chou kale). On peut aussi tout simplement replanter du gingembre ou des patates douces achetées en magasin bio.
On trouve plus rarement des légumes pérennes en jardinerie, mais on peut les trouver dans les pépinières de certaines forêts nourricières comme La Forêt Gourmande en Bourgogne (ex. gingembre rustique, etc.). Et il existe des boutiques en ligne spécialisées dans les légumes pérennes et rares, comme celle-ci ou celle-là (ex. poireau perpétuel, gingembre rustique, chou kale, basilic, tomate cerise, etc.).
Et si vous voulez tenter les semis, on trouve facilement des graines dans les jardineries, dans certains magasins bios, et chez l’association Kokopelli en ligne (ex. tomate cerise, basilic, chou kale, etc.).
Si vous ne trouvez pas spécifiquement les plantes que je propose, pas de problème ! Une infinité de combinaisons sont possibles, et permettent toutes d’en apprendre énormément sur la nature.
On pourrait remplacer le gingembre par le curcuma. On pourrait remplacer la tomate cerise par du piment. On pourrait remplacer le basilic par de la menthe. On pourrait remplacer le chou kale par le chou Daubenton qui sera plus imposant mais plus pérenne. On pourrait remplacer le poireau perpétuel par de l’ail rocambole. Etc.
Visitez une jardinerie, visitez une boutique en ligne, et choisissez des belles plantes qui vous motivent. Les deux idées principales pour une mini-forêt comestible qui mime la nature, sont de favoriser les plantes pérennes ou faciles à multiplier et de varier les formes et les familles de plantes.
Quand planter la mini-forêt ?
En général, le printemps est le moment idéal pour planter les végétaux. Vers mars-avril, lorsque les grands froids se raréfient et la nature se réveille.
En climat méditerranéen, on peut même commencer à expérimenter dès janvier ou février ! Et si vous vous y prenez tard, il est toujours possible de planter pendant l’été, en prenant garde à bien arroser. Votre production sera plus petite, mais vous en apprendrez énormément pour mieux réussir l’année suivante.
Le chou kale et le poireau perpétuel (et tous les autres choux et poireaux) sont formidables en climat froid, car ils résistent au gel. On peut aussi bien les planter à l’automne qu’au printemps.
Le rhizome de gingembre rustique et la racine de patate douce résistent au gel lorsqu’ils sont bien protégés dans le sol. Cet hiver, en Bourgogne, j’ai tenté de laisser mon gingembre et mes patates douces directement en terre. J’attends de voir ce que ça va donner… Mais pour démarrer la mini-forêt sans prendre de risque, mieux vaut les planter au printemps après les gelées.
Les tomates et le basilic sont des plantes délicates qui ne résistent pas au gel. On peut garder les plants à l’intérieur avant de les repiquer dans le bac, vers le mois de mars ou avril, quand les gelées se font plus rares.
Quand on veut essayer d’allonger la période de croissance des plantes en climat froid, on peut recouvrir le bac d’un plastique transparent qui fera office de serre. Dans ce cas, on peut tout tenter dès février-mars, y compris le gingembre, la patate douce, les tomates et le basilic.
L’un des avantages de cultiver sur son balcon, c’est que l’on est toujours très proche de notre mini-forêt. En un coup d’œil, on peut vérifier la température extérieure et le moral de nos petits plants. Ont-ils froid ? Vaudrait-il mieux les couvrir avec une bâche en plastique ? Ou même rentrer le bac à l’intérieur pour la nuit ?
Un autre avantage, c’est qu’un balcon a son propre microclimat. Les murs le protègent du vent et renvoient la chaleur du soleil la nuit. Souvent, alors qu’il gèle dans la rue, la température reste au-dessus de zéro sur le balcon, ce qui limite les chances de perdre des plantes, et incite à essayer des plantes plus exotiques !
Comment s’occuper des plantes ?
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La patate douce
Lorsque le sol se réchauffe peu à peu, des petites pousses se développent sur les patates douces et sortent du sol.
En général, les tiges de patates douces ont tendance à ramper. Elles captent alors la lumière du soleil bien au-delà du bac lui-même, et colonisent peu à peu votre balcon ! Vous pouvez essayer de les faire monter sur une structure afin de vous créer un cocon végétal ombragé. Pendant ce temps, de nouvelles petites patates douces se développent dans le sol.
Quand vous souhaitez élaguer un peu tout ça, ne jeter ni les feuilles ni les tiges. Elles se consomment comme des épinards. Vous pouvez laisser les patates douces en terre et ne récolter que les tiges, qui repartiront année après année. Ou bien, vous pouvez aussi récolter des racines de temps en temps, à l’automne ou en hiver.
Des patates douces envahissent notre micro potager urbain à Taïwan.
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Le gingembre rustique
Si vous replantez du gingembre acheté en magasin bio, il faudra bien prendre garde à rentrer le bac en hiver, ou à bien le protéger à l’aide d’un plastique par exemple. Si vous vous êtes procuré du gingembre rustique, il devrait résister à l’hiver s’il est bien enterré.
Chaque année au printemps, des jeunes pousses repartent des rhizomes de gingembre, se développent, et se dessèchent à l’automne. Vous pouvez alors récolter les rhizomes et en re-semer quelque uns pour l’année suivante.
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Le poireau perpétuel
Quand votre poireau perpétuel a de bonnes feuilles comme sur la photo ci-dessous, vous pouvez tout couper au niveau du sol et vous régaler. Si vous laissez bien les racines dans le sol, les feuilles repartent, encore et encore.
Vers la fin de l’été cependant, les feuilles se dessèchent. Ne prenez pas peur ! Si vous ne faites rien, plusieurs poireaux repousseront à l’automne au même endroit. Si vous ouvrez le sol, vous découvrirez de nombreux petits bulbes que votre poireau aura préparés. Vous pouvez alors les replanter un peu plus éloignés les uns des autres pour multiplier vos plants.
Notre poireau perpétuel repart de plus belle en octobre, en Bourgogne.
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Les tomates cerise
Les tomates ne sont pas des plantes pérennes, mais ce sont des chouettes plantes pour les débutants, car elles produisent plein de fruits délicieux et leurs graines se ressèment très facilement.
Les tomates cerise sont plus intéressantes que les autres tomates, surtout sur une petite surface et quand on débute, car elles produisent sur une plus grande période que les autres tomates, elles mûrissent rapidement, et d’après mon expérience, elles résistent mieux aux maladies comme le mildiou.
Si vous laissez le plant se développer, il aura tendance à ramper sur votre balcon. Vous pouvez aussi l’attacher à un tuteur pour l’aider à partir vers le haut. L’année dernière, mes plants de tomate cerise ont dépassé 2 mètre de hauteur !
La pratique la plus courante avec les tomates est de supprimer les gourmands, c’est-à-dire ces tiges secondaires qui partent de l’aisselle des feuilles et qui produisent beaucoup de feuilles mais peu de fruits. Vous pouvez recycler ces gourmands en les laissant sécher et se décomposer sur le sol du bac. Mais je vous invite aussi, si vous préférez, à laisser ces gourmands s’exprimer comme ils le veulent et à observer ce qui se passe…
La récolte de tomates cerises sur le toit de notre immeuble à Taïwan.
- Le basilicTous les basilics font l’affaire, par exemple ceux qui sont vendus dans les grandes surfaces au rayon fruits et légumes. Mais si vous trouvez un basilic poivré, avec des feuilles un peu plus pointues et un peu plus foncées, il sera plus rustique. C’est une plante pérenne en climat tropical, donc vous pouvez essayer de le transformer en une sorte de petit arbuste que vous retaillez au fil des récoltes, année après année. À chaque fois que vous coupez une tige de basilic, deux tiges poussent à la place ! Et en récoltant les fleurs de temps en temps, cela stimule la production de feuilles.
Un plant de basilic de 2 ans continue sa vie, dans un jardin urbain abandonné à Taïwan
- Le chou kaleLe chou kale a une forme élégante de minicocotier !Les premières feuilles sont assez grandes, puis viennent les fleurs qui sont aussi comestibles. Vers la fin de l’été et à l’automne, de nouvelles tiges apparaissent ici et là, qui produisent une multitude de feuilles un peu plus petites qu’au début. Vous pouvez récolter les feuilles une à une et les fleurs quand vous le souhaitez, et vous régaler. Le chou kale est une plante bisannuelle, mais j’essaie de le faire durer aussi longtemps que possible pour voir ce qui se passe… Si vous préférez un chou plus pérenne, et si vous avez plus de place sur votre balcon, le chou Daubenton vous ravira.
Un chou kale de 1 an et demi qui ne cesse de s’étoffer, en Bourgogne

Multipliez et offrez tout ce que vous pouvez !
Une des raisons pour lesquelles je vous propose cette série de plantes, c’est qu’elles sont toutes faciles à multiplier !
On peut multiplier les végétaux de plusieurs façons. Les manières les plus courantes sont de semer des graines, de replanter des bulbes ou des tubercules, et de bouturer, c’est-à-dire de replanter des tiges afin qu’elles reforment des racines.
Le gingembre rustique. On peut multiplier le gingembre en récoltant les rhizomes à l’automne et en les replantant ailleurs.
Le poireau perpétuel. On peut multiplier le poireau perpétuel en récoltant les bulbes à la fin de l’été et en les replantant ailleurs.
La patate douce. De même, on peut multiplier la patate douce en récoltant les nouveaux tubercules à l’automne et en les replantant ailleurs. Mais on peut aussi bouturer les tiges de patate douce très très facilement ! Coupez une tige, enlevez les feuilles, laissez le bas de la tige tremper dans un verre d’eau, et des racines apparaitront après quelques jours s’il fait assez chaud, ou après une ou deux semaines s’il fait froid.

Cette bouture de patate douce a développé ces nouvelles racines en quelques jours seulement !
Le basilic. On peut facilement multiplier le basilic par bouturage, exactement comme pour la patate douce. Mais on peut aussi récolter les graines, les conserver, et les semer au printemps. Si vous n’avez jamais semé de graine, cela peut être une bonne occasion pour apprendre.
Chou kale. On peut récolter les graines du chou kale et les semer l’année suivante. En général les graines de la famille des choux sont faciles à faire germer. Mais on peut aussi bouturer des tiges. Cette fois-ci, il faut les mettre directement dans une terre humide, car les tiges ont tendance à pourrir si elles sont directement dans l’eau.
Les tomates cerise. On peut bouturer les tiges de tomates en les trempant dans l’eau, mais on peut aussi récupérer les graines et les faire germer facilement au printemps suivant ! Une des multiples façons de préparer les semences des tomates, c’est de laisser tremper les graines 24 h dans de l’eau. La fermentation dissout le gel qui entoure les graines, et après les avoir rincées, il devient plus facile de les manipuler et de les faire sécher.
Avec ces 6 plantes, vous avez déjà de quoi apprendre les principales manières de multiplier les végétaux. Alors, multipliez, multipliez, et offrez ces magnifiques plantes autour de vous !
2 livres pour aller plus loin
Si, tout comme moi, vous développez au passage une passion pour les légumes perpétuels, voici deux livres qui pourraient vous intéresser :

Le potager perpétuel – Bernard Bureau & Philippe Collignon

Mon potager de vivaces : 60 légumes perpétuels à découvrir – Aymeric Lazarin
On se retrouve en avril 2023 pour observer tout cela pousser et tenter de diversifier un peu notre mini-forêt comestible !
Afin d’approfondir ce thème
N’hésitez pas à jeter un coup d’œil à notre rubrique « développement durable » où podcasts, vidéos et articles vous attendent.